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4. Le 6ème continent : l'Antarctique
L'empire de la glace, où gît l'essentiel des ressources en eau douce de la planète... Sur la calotte gelée, le blizzard
et le froid. Tout autour, un océan d'une incroyable générosité, où le plancton "fleurit" par millions de tonnes.
© photo René Robert / Antarctica
Imaginons que nous sommes un albatros. Nous entamons notre voyage vers l'Antarctique à partir des îles Malouines (Iles Falkland) au sud de l'Argentine.
Nous nous dandinons sur nos pieds palmés en direction de la piste de décollage. Nous traversons des nuées pépiantes de gorfous et de manchots papous, auxquels se mêlent des manchots de Magellan,
des manchots royaux aux joues oranges et des cormorans. Décollage. Nous nous élevons dans l'air, prince des nuées...
Nous survolons les ceintures de kelp de l'île, ces algues génates, parfois longues de 50 mètres, qui forment d'immenses forêts marines.
Le plancher de l'océan est jonché de brachiopodes à la coquille mauve - survivants de l'ère primaire.
Il y a là des étoiles de mer, des galathées, des crabes centollas d'un mètre d'envergure.
Et des myxines - autres fossiles vivants !
Ces cousines des lamproies sont des pré-poissons sans machoires (agnathes), â la bouche en ventouse.
Les poissons restent rares : sébastes noirs et morues antarctiques...
Cap au sud. Après la Terre de Feu, le détroit de Drake. Et la Convergence antarctique.
C'est une des frontières majeures du monde.
Quand on la passe, les températures de l'air et de l'eau chutent brusquement de plusieurs degrés.
Nous autres, animaux, connaissons de longue date cette barrière thermique.
Au nord, les eaux tièdes des trois grands océans (Atlantique, Indien, Pacifique).
Au sud, les eaux glaciales de l'océan Antarctique.
Ces masses liquides froides et denses s'enfoncent sous les eaux tempérées et coulent vers le nord, invisibles,
pendant des milliers de kilomètres. Elles ressortent au nord de l'équateur.
Les climats de la Terre en dépendent.
© photo René Robert / Antarctica
RENCONTRES MARINES
Nous nous posons sur la vague. Nous nous remplissons le jabot de crevettes nageuses - ce fameux krill qui
nourrit aussi les manchots et les baleines. Au sud, toujours plus au sud...
Nous dépassons des éléphants de mer en migration. Nous saluons des otaries.
Ces pinnipèdes se reproduisent en colonies sur les terres subantarctiques.
Selon le secteur géographique, on trouve l'otarie à fourrure d'Amérique du Sud et le lion de mer de Patagonie ;
l'otarie à fourrure des Kerguelen ; le lion de mer et l'otarie à fourrure d'Australie ;
l'otarie à fourrure de Nouvelle-Zélande et le lion de mer de Hooker.
Un souffle énorme. Une baleine ! La bleue, la géante absolue... 150 tonnes et 30 mètres. Elle a été massacrée.
Elle est protégée depuis trente ans, mais sa situation reste précaire. L'espèce compte moins de 5 000 sujets dans le monde.
Certains disent moins de 2 000... Au cours des années 30, les chasseurs en tuaient de 10 000 à 30 000 par saison de baleinage !
Les rorquals communs sont un peu moins grands que les baleines bleues ; eux aussi ont été saignés. Les rorquals boréaux (ou sei)
paient encore le tribut, ainsi que les petits rorquals.
Les Japonais en exécutent chaque année plusieurs centaines à des fins prétendument " scientifiques , malgré le moratoire,
malgré le sanctuaire aujourd'hui réservé aux cétacés dans les mers australes...
Avant le carnage, les baleines à bosse étaient nombreuses, elles aussi.
Désormais, il faut les chercher. Elles chantent, avec des meuglements de vache ou des gazouillis de pinson.
Chanteront-elles encore longtemps?
Le krill © photo René Robert / Antarctica
C'est au printemps austral (en novembre-décembre) que les grands cétacés migrent vers l'Antarctique.
Pour y faire leur lard... Les baleines se goinfrent tout l'été dans des nuages de krill.
Ce dernier constitue la principale richesse de l'océan glacial. Il vit d'algues minuscules, comme les diatomées.
Les eaux locales en produisent chaque année de 500 à 750 millions de tonnes.
SUR LE BLANC CONTINENT
Nous avons volé pendant des jours. Nous avons dormi sur l'océan, bercés par la houle. Nous arrivons au bout du voyage.
Nos ailes de géant nous ont introduits dans l'univers des glaces. Nous nous posons sur un iceberg. Voici le continent antarctique.
Le Grand Blanc...
Ici, aucune plante â fleurs ne survit - sauf deux espèces, dans les creux de rochers de la péninsule antarctique :
la canche (Deschampsia antarctica) et la sagine (Colobenthos subulatus).
Les animaux dépendent de la mer. Il suffit de plonger pour constater que le fond est admirable.
Les anémones de mer, les coraux mous, les bryozoaires, les vers annélides, les mollusques, les crustacés,
les échinodermes peuplent les sédiments que les icebergs ne labourent pas trop.
Les poissons - rares - appartiennent à 90% au groupe des notothénoïdes, ou morues antarctiques.
Les plus étonnants sont les poissons-glace : ils sont transparents, car leur sang n'a pas d'hémoglobine.
Ils synthétisent des protéines antigel (des glycopeptides) qui leur permettent de maintenir en fusion leurs liquides internes,
même quand la température de l'eau de mer descend au-dessous de 0.
© photo René Robert / Antarctica
Les oiseaux enchantent ces rivages. Ils se recrutent parmi les albatros (six espèces), les puffins, les pétrels, les prions, les fulmars ;
sans oublier les cormorans, les chionis, les goélands et les sternes. Les principaux locataires de la
glace sont, bien sûr, ces oiseaux qui ne volent pas mais nagent si bien.
Seuls les Français les appellent "manchots" les autres disent pingouins.
Le gorfou macaroni, le manchot à jugulaire, l'adélie et l'empereur...
Passionnants personnages. Seuls l'adélie et l'empereur osent accomplir la totalité de leur cycle vital sur le continent même.
Il y faut une extraordinaire adaptation au froid. Pouvoir supporter des températures hivernales de -70°C Et de longues périodes de jeûne.
Les pinnipédes sont représentés par l'otarie à fourrure de l'Antarctique (sur la péninsule),
l'éléphant de mer du Sud et quatre espèces de phoques : le crabier, qui mange du krill, nonobstant son nom ;
le phoque de Ross, amateur de calmars, rare et mal connu ; le phoque de Weddell, supercrack de la plongée ;
et le phoque léopard, qui répand la terreur dans les rangs des manchots.
EN DANGER DE SOUILLURE
Toutes ces créatures composent un écosystème plus varié qu'on n'imagine, plus fragile qu'on ne croit.
Seul l'isolement de l'Antarctique l'a préservé jusqu'à nos jours. Dans ces eaux et sur ces rivages, la vie est toujours sur le fil.
Le plus léger déséquilibre entraîne des catastrophes. Ces organismes disparaîtraient si l'on exploitait massivement le krill et
si l'on surpêchait les calmars et les morues antarctiques (comme on a commencé de le faire).
Le désastre serait que l'homme s'installe en nombre dans ce sanctuaire glacial, avec ses bateaux, ses avions, ses hélicoptères,
ses derricks de forage, ses usines. Ses déchets organiques. Ses marées noires...
Telle est la menace qui pèse sur le dernier continent vierge. Sans oublier les effets, peut-être déjà sensibles,
du changement climatique : d'énormes icebergs, parfois grands comme la Corse, se détachent des plates-formes littorales.
Le trou d'ozone ne cesse de s'agrandir au-dessus de la contrée. Temps souillé sur le Grand Blanc...
Quelques liens :
- http://www.transpolair.com/
TRANSPOL'AIR : historique de l'aventure polaire et de ses acteurs.
- http://www.antarctica.org/
Antarctica : Expéditions, environnement, galerie, éco-tourisme, ...
 5. Le Sanctuaire des Baleines Grises de Basse Californie
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